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Une nouvelle fois j'ai été contacté par un internaute, Philippe Duverger* qui travaille au Etats-Unis et qui détient quelques exemplaires du journal illustré créé par Lazare Ravel en 1890. Je tiens, à l'occasion de la rédaction de cet article, à le remercier vivement pour ses envois successifs.

* C'est par Omer Georges Albert Coueslant, un des fils de Jean Marie Coueslant, puis sa fille Marie Louise Renée Jacqueline qui épouse Jules Victor François Duverger et enfin Alain Georges Victor Duverger, que ces "précieux" documents ont été transmis de génération en génération.

La troupe du théâtre Ravel a séjourné d'août à octobre 1889 à Dieulefit (Drôme) et mon arrière grand-père s'est lié d'amitié avec Emile Louis Coueslant (son cadet de 2 ans),souvent évoqué, sous le prénom d'Emile, aux chapitres "correspondance" des Cosmopolites. fils de Jean-Marie Coueslant, instituteur de cette ville. Ce dernier, avait créé, à Dieulefit, la première bibliothèque républicaine, ainsi qu'un observatoire astronomique. On admet facilement que Lazare, lui aussi fervent républicain et astronome amateur se soit rapproché de cet instituteur. Jean-Marie Coueslant qui devient en quelques sortes son mentor, lui a donné une lunette astronomique que l'on peut découvrir sur les photos de la roulotte prise en 1906 à Jonquières. 

Les documents numérisés par Philippe Duverger (du N°1 de 1890 au  N°11 de 1896) du journal illustré baptisé "Cosmopolite" ainsi que la correspondance adressée à M. Coueslant, transmis à ce jour par Philippe Duverger sont riches d'enseignement sur le théâtre et les pensées de leur auteur.

 Dans ces ouvrages (Le Cosmopolite) rédigés de sa propre main en noir et couleurs, largement illustrés de petits dessins et aquarelles (on peut se demander combien d'exemplaires étaient ainsi édités * compte-tenu des moyens de reproduction de l'époque), Lazare nous fait part de ses impressions de voyage en décrivant de façon assez poétique et souvent illustré le spectacle de la nature qu'il lui était permis de contempler (Etoîle - Drôme en 1889, Corps et Notre Dame de La Salette  -Isère- en 1896) .

            * En fait chaque numéro du "Cosmopolite" était édité en 2 exemplaires. Un pour M. Jean-Marie Coueslant et l'autre destiné à être conservé par son auteur (Voir Cosmopolite n°6).

La "Une" de l'exemplaire n°11 de 1896, rédigée depuis Corps (Isère) où le théâtre était stationné, est constituée d'un croquis du village sur lequel on découvre la position des voitures dans le village. En arrière plan on peut distinguer l'hôtel "Chez Dumas" (rue des fossés, devenu depuis l'hôtel de la Poste). Au centre une photo de l'auteur, âgé en 1896 de 28 ans, au format d'une palette d'artiste peintre, complète cette première page. Cosmopolite 1896 N11 p1

  CPA-hotel-dumas.JPG

 

  Le deuxième envoi de Philippe Duverger concerne les numéros 2 et 3 du Cosmopolite.

Le numéro 2 est surtout consacré à la description des lieux visités par l'auteur autour du point de stationnement de la troupe. Ainsi, aux environs d'Etoile il découvre le chateau de Mac-Carthy (*), les village de La Paillasse, de Rousset, d'Upie. Il nous livre ausi quelques réflexions sur notre Humanité.

(*) Ce château est aujourd'hui connu sous le nom de : château de Beauvallon. Il date du milieu du XVIIe siècle et fut construit sur les bases du château-fort des Poitiers dont il ne subsistait que quelques vestiges. C’est Charles-Jacques de Bressac qui le fit ériger en 1654. C’était l’un des plus beaux et des plus agréables châteaux de la Drôme. Il n’a pas souffert de la révolution française. Napoléon Bonaparte, en garnison à Valence, s’y rendra à plusieurs reprises. En 1809, Robert-Joseph de Mac Carthy, de souche irlandaise, député de la Drôme, épousa « une fille de Bressac » et devint ainsi le nouveau propriétaire du château. Il effectue des transformations : il l’élève d’un étage, remplace le toit par une terrasse et couronne les murs de créneaux. Le domaine est vendu en 1849 et passe aux mains de bourgeois enrichis.

Dans le numéro 3, rédigé, comme le n°2, depuis Etoile (Drôme) l'auteur apporte quelques précisions sur la fréquence de parution de son journal illustré. Ainsi, on apprend que le premier exemplaire est paru en 1885 (Lazare avait alors 17 ans) et que sa fréquence de parution est bimensuelle. L'auteur précise qu'il était destiné d'abord à quelques amis puis au vieillard de 60 ans qu'il espère être un jour. En fait, par ce journal, Lazare rédige "ses mémoires", témoignage de sa jeunesse et qu'il pense relire plus tard avec émotion et montrer à ses petits enfants.

Conscient de la fatuité de ses écrits il ajoute : "Si je n'arrive point à cet âge où le passé chasse les sombres idées de l'avenir, ce journal restera caché pour longtemps, sans doute au fond d'une caisse, perdu au milieu d'autres feuilles éparses, froissé, déchiré par les parasites du papier..."

 Cette prémonition a failli se réaliser. Par la magie d'Internet et le bon vouloir de son détenteur, ces pages, rédigées il y a plus de 110 ans sont, pour ceux qui veulent bien les lires, étalées au grand jour.

Au numéro 4, Lazare commente le trajet qu'il effectue le 6 mars 1890, avec la troupe, pour se rendre d'Etoile-Sur-Rhône à Beaumont-Les-Valence où le théâtre dresse ses tréteaux. Ensuite il décrit le spectacle des villages entrevus lors du voyage qu'il effectue avec Thérèse, son épouse, de Beaumont-Les-Valence à Mondragon. (Suivre les liens pour découvrir mes commentaires personnels sur ces deux voyages).

En fin de ce numéro, on trouve comme d'habitude, un chapitre "correspondance" où il évoque les échanges épistolaires qu'il entretien avec Jean-Marie Coueslant.

Au numéro 5 daté du 25 mars 1890, Lazare, après avoir repris une citation de Camille Flammarion, le célèbre astronome et vulgarisateur de cette science,  exprime toute son attirance et sa passion pour l'astronomie à travers ses "impressions du ciel" rédigées depuis Beaumont-Les-Valence.

 Dans ce numéro on trouve trois dessins aquarellés représentant le village de Montéléger, le pont sur la Véore au domaine de Lorient (Montéléger) et la fabrique des fontaines à Beaumont-Les-Valence.

Enfin, écrivant à Jean-Marie Coueslant, Lazare exprime sa satisfaction devant l'accueil réservé à la troupe par la ville de Beaumont-Les-Valence où le travail marche d'une manière inespérée.

Après la réception et l'analyse des numéros 6, 7/8, 9 et 10 du "Cosmopolite" de l'année 1890, j'ai mieux cerné le contenu de cette publication. En effet, celle-ci apparaît davantage comme le besoin de son auteur d'exprimer ses impressions de voyage que comme l'itinéraire du théâtre. En aucun moment, Lazare évoque le théâtre que l'on suppose stationné non loin des villages et paysages qu'il découvre. Au delà de ses "impressions de voyage", au numéro 10, il entame (chapitre I - Le départ) un autre exercice de style en débutant le récit  d'un voyage imaginaire intitulé "Un rêve". Celui-ci, sans doute, prolonge ses nombreuses lectures de romans d'aventure très en vogue à cette époque.

Poursuivant ses visites, aux numéros 11 et 12, Lazare Ravel nous décrit la pittoresque région du Royans dans laquelle séjourne la troupe. Il nous fait découvrir des sites dont la vision l'enchante, nous incitant, après plus de 120 années, à refaire le chemin sur la trace de ses pas pour constater, peut-être, les profondes transformations des sites jadis enchanteurs.

   (suite)

Tag(s) : #Théâtre Ravel, #Lazare Ravel
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